LA PECHE AU VIF: Deux poissons presque identiques pris dans des conditions totalement différentes.

  Nous le savons tous, la pêche nous réserve beaucoup de surprises et de situations inattendues, quel que soit le poisson recherché ou la méthode que l'on utilise pour le capturer.

  Pour illustrer ce propos, voici deux prises réalisées l'une lundi, l'autre mardi et si je recherchais la première, je ne m'attendais pas du tout à la seconde.

  LUNDI :

   Je recherche le brochet avec un matériel et un vif tout à fait classiques.

   Canne de 7 mètres posée, montage au bouchon flottant fixe et gardon de 300 grammes attaché par le dos à un hameçon de triple zéro. Bas de ligne en crinelle.

    Vers 17 heures, départ ! Le bouchon s'enfonce, remonte puis repart, entrainant la tresse qui se dévide du moulinet sans résistance .

    Avec un vif de cette taille, je pensais bien avoir affaire à un beau poisson que je laisse partir...pas trop, comme d'habitude pour qu'il n'engame pas complètement le vif...Ferrage...Il est pris et bien que je sois un peu déçu par la résistance qui n'est pas à la hauteur de mes espérances, je ramène ce brochet vers l'épuisette. Du classique, vraiment.

   Remarquez, lorsqu'on ouvre sa bouche, il n'y a pas de quoi s'étonner qu'il attaque un vif de cette taille mais qu'à celà ne tienne, ce poisson ne demande qu'à grossir.

    Comme le veut ma pratique, après une prise de brochet sur un coup amorcé, je range ma canne au ratelier et je ne le pêche plus pendant plusieurs jours. Dont acte !

MARDI : 

      Le sandre semble décidé en ce moment. Je pose donc deux cannes à fond eschées chacune d'un goujon. Corps de ligne en 25 centièmes, hameçon de 6 monté sur un bas de ligne en fluorocarbone de 20 centièmes. Durant l'après-midi, seules quelques perches viennent "taquiner le goujon". Elles doivent être mélomanes ! 

      Comme tous les pêcheurs, je sais que les plus gros sandres sortent plus volontiers le soir, lorsque le soleil passe derrière les arbres de la rive opposée, plongeant la rivière dans l'ombre. C'est le moment de relever les cannes pour controler l'état des vifs, de ranger la canne à coup et d'attendre le "petit coup du soir"...S'il veut bien venir ! Depuis un bon moment, je n'avais plus de touches de perches ni de petits sandres...Pas même un frémissement de mes scions pourtant particulièrement sensibles.

        Je relève donc la première canne...Enfin, disons plutôt que j'essaie !...parce que lorsque je prends contact avec la plombée, un poisson bien décidé à ne pas se laisser amener est au bout. Une perche, ai-je pensé. Mais ça se défend bien, trop pour être une perche ! A gauche, à droite, ça part en prenant du fil. Pas une touche, pas un frémissement de scion annonciateur. Serait-ce un beau sandre un peu en avance sur l'heure qui aurait pris le vif au moment où j'ai relevé et, de ce fait, ce serait ferré seul ?  Voyons, sur du nylon de 20 centièmes, ça ne peut pas être un beau brochet ! Il y aurait longtemps qu'il m'aurait coupé ! Et pourtant !

         Après une bonne dizaine de minutes, toujours sans casse, évidemment, je vois le poisson arriver entre deux eaux: Un brochet ! Oui, un brochet, avec un goujon (ça, ce n'est pas exceptionnel ), sans touche, sans me faire couper le fil ! Evidemment, je n'ai pas sorti l'épuisette, comme trop souvent !.

          Je ramène donc ce poisson au bord, je coince la canne contre la rive, je remonte à la voiture et j'assemble les deux parties de l'épuisette puis je redescends, persuadé que le brochet s'est fait la malle entretemps. Que non ! Il est toujours là, à plat sur l'eau, sans bouger, sans doute très fatigué et je me dis que pour le réoxygéner, ça ne va pas être facile, d'autant que la berge est haute et qu'il n'est pas question que je descende le mettre en position de nage pour qu'il reprenne ses esprits.

        Je lui ouvre tout de même la gueule, persuadé qu'il est piqué au bord mais surprise, je ne vois même plus mon hameçon de 6 qu'il a déjà avalé si loin que seul le fil est encore visible. Il ne reste qu'à couper, en espérant que mon copain d'un instant digèrera cette proie métallique même s'il doit jeûner pendant quelques jours. 

         Forcément, dans ces cas-là, on se perd en conjonctures. Sans doute ce brochet a-t-il pris mon malheureux goujon puis est-il resté posé au fond sans bouger, en avalant sur place. Avait-il fait le plein avant et s'est-il "envoyé" une dernière friandise avant de s'endormir du sommeil du juste ? Restait-il posé au fond en attente d'autres proies ? Toujours est-il que je n'ai rien vu et, surtout, qu'il ne m'a pas coupé mon 20 centièmes. La seule chose dont je sois à peu près certain c'est que, compte-tenu de la profondeur où j'ai supposé que se trouvait l'hameçon, il devait être là depuis un bon moment !

          Il faut le réoxygéner, vite ! Après tout, puisque je n'avais pas prévu mon épuisette, autant qu'elle me serve une seconde fois pour tenter le coup !

    A gauche, à droite, à gauche, à doite, un pas en avant, deux pas en arrière pour être en harmonie avec la politique actuelle, jusqu'à ce que je vois la gueule et les ouies battre alternativement et le poisson reprendre sa position de nage. Il ne me reste plus qu'à abaisser doucement le fer de l'épuisette jusqu'à ce que mon brochet reparte seul en le franchissant, preuve qu'il aura retrouvé la force et la volonté de se libérer.

      Gagné, gentil brochet et, surtout, n'oublie pas de me donner de tes nouvelles !

    Maintenant, à vous d'être interviewés, chers amis pêcheurs ! Quelles sont les chances de survie d'un brochet qui s'est farci un hameçon de 6 comme s'il n'avait rien d'autre à se mettre sous la dent ?

     Hameçon forgé bronzé....pas de l'inox !