Chers pêcheurs,
L'année 2024 se termine de manière particulièrement difficile pour la pêche de loisir en Seine-et-Marne.
Depuis la mi-octobre, nous sommes confrontés à l'une des pollutions les plus graves que nous ayons eu à gérer.
Le canal du Loing, créé au début du XVIIIe siècle pour faciliter le transit fluvial entre le bassin Loire et Seine, est aujourd'hui le théâtre d'une catastrophe environnementale sans précédent pour notre département, entre l’écluse du Grand Moulin à Château-Landon et celle des Buttes à Nemours, sur une distance de 12 kilomètres.
Cette pollution majeure représente une menace sérieuse pour nos milieux aquatiques et notre pratique de la pêche, qui a eu un impact fort sur notre réseau, mais qui a néanmoins pu prouver au cours des trois dernières semaines son engagement et sa résilience.
Par ces quelques lignes, nous souhaitons vous informer des actions menées et des résultats obtenus à ce jour pour défendre nos intérêts communs et protéger notre environnement.
Contactée par nos pêcheurs locaux mi-octobre, la Fédération s’est rendue directement sur place pour effectuer les premières constatations, qui ont été transmises aux services de l’État en charge de ces sujets.
Cette pollution d’envergure a principalement affecté trois de nos AAPPMA : Le Goujon de Souppes-sur-Loing, La Vandoise et le Gardon du Loing, ainsi que La Gaule du Loing. Elle a causé, dans un premier temps, la mort d’au moins 5 tonnes de notre cheptel piscicole, toutes espèces confondues (carpe commune, miroir et cuir, gardon, brème, perche, sandre, silure, brochet, tanche, rotengle, carassin, ablette, anguille, loche de rivière, chabot, etc.). Elle a également gravement altéré l’écosystème aquatique, la qualité de l’eau, et la biodiversité du canal.
Face à l'ampleur de cette catastrophe aquatique, des mesures d’urgence ont été mises en place.
Les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), en collaboration avec Voies Navigables de France (VNF), ont immédiatement déployé des moyens face à la gravité de la situation. Sous l’autorité du sous-préfet de Fontainebleau, des mesures ont été mises en place, incluant des protocoles de sécurité, des équipements de protection pour les intervenants et une surveillance renforcée. Une attention particulière a été portée aux substances toxiques, telles que l’hydrogène sulfuré (H₂S).
Les premières analyses réalisées par le SDIS, l’OFB et la DRIEAT ont révélé la présence de saccharose dans l’eau, indiquant une pollution organique massive. La DCO (demande chimique en oxygène), qui se situe normalement entre 9 et 10 mg/L pour un canal, a été mesurée en dessous de 0,4 mg/L. Cette valeur extrêmement basse reflète une anoxie (absence totale d’oxygène), causée par l’action des bactéries consommant le sucre et l’oxygène disponible.
Les bactéries produisent ensuite des sous-produits toxiques, tels que l’ammoniac ou les nitrites, accélérant la dégradation du milieu et entraînant des taux de mortalité élevés parmi les poissons et autres organismes aquatiques.
Parallèlement, la Préfecture a pris des arrêtés interdisant le cheminement le long du canal et la pêche, lesquels sont encore en vigueur.
Dès le samedi 26 octobre au soir, élus et salariés de la Fédération, réunis en cellule de crise, ont organisé les premières interventions avec l’aide des pêcheurs bénévoles et des agents municipaux de Bagneaux-sur-Loing, aussi bien en semaine qu'en week-end, jusqu’au 14 novembre.
La dernière action réalisée par notre réseau a été une mobilisation pour une opération de pêche de sauvegarde sur le bief de Beaumoulin, permettant de préserver plus de 2 tonnes de poissons vivants, représentant 17 espèces, dont des anguilles européennes, une espèce classée en danger critique d'extinction, ainsi que des silures, des brochets, des sandres, des perches communes, des brèmes, des carpes et divers poissons, tels que les loches de rivière, ainsi que le chabot, également présents et protégés dans le cadre de Natura 2000.
Cette opération a mobilisé, sur deux jours, plus de 25 bénévoles, l’ensemble du personnel de notre Fédération, ainsi que 26 salariés issus de six Fédérations voisines (Aisne, Essonne, Loiret, Oise, Paris et Yonne).
En plus de l'impact écologique dévastateur, cette situation engendre des coûts financiers considérables pour le réseau de pêche de loisir départemental de Seine-et-Marne :
• Logistique et organisation des opérations ;
• Ramassage des poissons morts ;
• Salariés mobilisés pour répondre à l’urgence ;
• Sauvegarde et surveillance des biefs et espèces.
L’ampleur de cette catastrophe environnementale nécessite la vidange progressive des biefs et la mise en place de mesures de prévention sous la direction des services de VNF. Nous continuerons à collaborer avec les gestionnaires locaux pour surveiller l’évolution de la qualité du milieu.
À ce jour, une enquête a été ouverte par le parquet de Fontainebleau pour déterminer l’origine précise de la pollution et identifier les responsables. La Fédération et les AAPPMA concernées envisagent de porter plainte et de se constituer parties civiles afin de demander réparation des préjudices subis et soutenir les mesures de restauration de l’écosystème.
Cependant, cette démarche nécessitera un certain temps avant d’aboutir.
En parallèle, nous avons échangé et rencontré les représentants de l’État ainsi que plusieurs élus locaux, départementaux, régionaux et nationaux :
• M. Pierre ORY, préfet de Seine-et-Marne ;
• M. Thierry MAILLES, sous-préfet de Fontainebleau ;
• M. Romain GUILLOT, directeur de la DDT ;
• M. Laurent BÉDU, adjoint au directeur de la DDT ;
• Mme Valérie LACROUTE, vice-présidente du Conseil régional d’Île-de-France ;
• M. Frédéric VALLETOUX, député de la 2ᵉ circonscription de Seine-et-Marne ;
• Mme Béatrice RUCHETON, conseillère départementale du canton de Fontainebleau, en charge de l’environnement ;
• M. Benoît DIGEON, président de l’EPAGE du bassin du Loing ;
• M. Dikran ZAKÉOSSIAN, maire de Moret-Loing-et-Orvanne et président du comité de pilotage du site Natura 2000 "rivière Loing et Lunain" ;
• M. Claude JAMET, maire de Bagneaux-sur-Loing ;
• M. Pierre BABUT, maire de Souppes-sur-Loing.
Ces échanges ont permis de définir les grandes lignes d’un plan d’action, dont la priorité est de rétablir un équilibre aquatique durable pour le canal du Loing. Ce plan vise également à soutenir les bénévoles des AAPPMA (Associations Agréées pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique), directement impactés par cette situation.
Nous apporterons notre concours pour que des mesures adaptées soient prises afin de préserver la biodiversité et garantir des conditions optimales pour la pêche de loisir.
Pour conclure, je tiens à exprimer ma profonde gratitude et reconnaissance envers toutes celles et tous ceux qui participent activement à la mobilisation pour le sauvetage des poissons du canal du Loing :
• Les différents services de l’État : Préfecture, DDT, OFB, DRIEAT ;
• Les services départementaux d’incendie et de secours,
• Les forces de l’ordre, nationales et municipales ;
• L’équipe de Voies Navigables de France (VNF) ;
• Les élus locaux ;
• Les agents municipaux de la mairie de Bagneaux-sur-Loing ;
• Les salariés et élus des Fédérations et des AAPPMA mobilisées ;
• Les bénévoles des AAPPMA, les pêcheurs venus de divers horizons, ainsi que les riverains.
Grâce à votre engagement, à votre dévouement et à l'implication de notre réseau de bénévoles, nous sommes en mesure d'apporter une réponse collective aux défis de pollution qui affectent gravement ce patrimoine naturel commun.
Votre mobilisation – que ce soit à travers le ramassage des poissons morts, la résilience dont vous faites preuve, ou encore les efforts pour limiter les pertes de poissons de diverses espèces – est un exemple inspirant de solidarité et de responsabilité envers notre environnement. Ce sont des actions comme les vôtres qui nous permettent d'espérer transmettre aux générations futures un cadre de vie sain et respectueux de la nature.
Nous restons pleinement mobilisés pour limiter les conséquences de cette pollution, protéger les écosystèmes et garantir l'avenir de la pêche de loisir sur le canal du Loing.
Nous vous tiendrons informés de l'évolution de ce dossier et des initiatives que nous mettrons en place pour limiter les impacts de cette pollution.
Le Président Fédéral
Philippe GAVELLE
Comme vous pouvez, hélas, le voir, aucune espèce n'échappe à cette catastrophe ! Carpes, goujons, gardons, anguilles même, ce qui indique une pollution grave touchant le fond du canal si fréquenté par nos amis pêcheurs.
SOLIDARITE AVEC NOS AMIS PÊCHEURS ET HONTE AUX POLLUEURS !